20 novembre 2024
Général
7 septembre 2022
Plan de transition juste: Bâtir un Québec plus vert
Pour une version imprimable: Bâtir un Québec plus vert.
1 | INTRODUCTION
Les changements climatiques mettent les écosystèmes et les sociétés sous pression. Leur intensité pousse les sociétés à consacrer des ressources de plus en plus importantes à des mesures d’adaptation et de réparation pour faire face à leurs effets dévastateurs. En amont de ces derniers, la lutte contre le réchauffement climatique exige de repenser les modes de transport, d’échange, de construction, de production, de consommation et de revoir les fondements de l’aménagement du territoire qui contribuent à plusieurs égards au dérèglement climatique.
Consciente de l’urgence climatique, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) milite et revendique depuis plusieurs années une économie à la fois plus juste sur le plan social et plus responsable sur le plan environnemental. Pour arriver à cette nouvelle économie, la FTQ mise sur une transition énergétique par laquelle notre modèle économique actuel réduirait considérablement ses émissions de gaz à effet de serre (GES) et sa dépendance envers des sources d’énergie polluantes, et se restructurerait autour d’énergies renouvelables et de procédés moins polluants et moins énergivores. Pour être viable et durable, cette transition ne devrait laisser personne, ni aucune communauté de côté, et devrait être source d’une nouvelle prospérité pour tous. C’est pourquoi la FTQ soutient l’avènement d’une « transition juste » et s’active pour porter cette vision et la faire partager par les gouvernants, les entreprises et les autres organisations de la société civile.
Dans ce contexte, la FTQ-Construction a pris l’initiative de se doter de ce plan de transition pour l’industrie de la construction au Québec. Résultat d’une introspection sur le secteur économique du bâtiment, ce plan se veut une référence pour la FTQ-Construction dans ses interventions auprès de l’industrie et une liste non exhaustive de mesures qui peuvent être prises afin de renverser la tendance mondiale et lutter contre les changements climatiques.
Le plan s’attaque à deux aspects névralgiques de la construction : le cycle de vie des matériaux et des bâtiments; et l’efficacité énergétique. Nous aborderons comment la construction doit revoir son approche face aux matériaux et aux bâtiments à travers tout son cycle de vie : de la fabrication du matériel, jusqu’à la démolition, en passant par l’utilisation du bâtiment. De plus, nous étudierons l’importance de penser le parc immobilier dans une perspective d’efficacité énergétique afin de réduire les besoins énergétiques des bâtiments.
2 | PRÉSENTATION DE LA FTQ-CONSTRUCTION
La FTQ-Construction représente plus de 85 000 travailleurs et travailleuses de la construction. Avec une représentation de plus de 43%, elle est la plus importante organisation syndicale de l’industrie de la construction au Québec. La FTQ-Construction est divisée par sections locales de métiers ou d’occupations. En tout, 17 sections locales qui peuvent défendre les intérêts des travailleurs et des travailleuses.
Lorsqu’ils interviennent auprès des employeurs, les représentants savent exactement de quoi ils parlent puisqu’ils ont vécu eux-mêmes sur des chantiers, c’est leur propre réalité. Cela permet d’avoir des interventions précises et des conseils pertinents pour régler des conflits ou se simplifier la vie.
Au-delà des interventions terrain, cela permet aussi de savoir de quoi on parle quand vient le temps de discuter des défis de l’industrie. Il n’est pas surprenant que ce soit la FTQ-Construction qui défend les compétences des métiers et occupations. Les représentants de la FTQ-Construction sont issus de la base.
Au total, c’est plus de 120 représentants provenant des différents métiers et occupations qui travaillent ensemble pour le mieux de l’industrie. Quand vient le temps de penser aux besoins en perfectionnement, à la réglementation, à la prévention en santé et sécurité ou à l’éducation, la FTQ-Construction sait de quoi elle parle. La FTQ-Construction connaît les besoins et sait exactement ce qu’est la vie de chantier.
3 | CONTEXTE
Urgence climatique
Alors que vient de se terminer en avril 2022 le sixième cycle de rapport d’évaluation (RE6) du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), il n’y a plus aucun doute possible: le réchauffement de l’atmosphère, des océans et des terres est dû aux activités humaines. Les changements climatiques affectent déjà de nombreux phénomènes météorologiques et climatiques extrêmes telles que les fortes précipitations, les sécheresses, les vagues de chaleur et les tempêtes tropicales dans toutes les régions du monde.
Les changements climatiques que nous connaissons aujourd’hui et que nous connaîtrons dans les prochaines décennies dépendent directement de nos émissions actuelles et futures de gaz à effet de serre (GES) et de l’ampleur du réchauffement associé.
Malheureusement, les constats sur les émissions de la dernière décennie sont alarmants : alors que les émissions anthropiques totales nettes de GES ont continué d’augmenter au cours de la période 2010-2019, les émissions annuelles moyennes au cours de cette même période ont été les plus importantes jamais vues dans l’histoire de l’humanité![1]
Selon le dernier rapport du GIEC, pour limiter le réchauffement planétaire à 1.5 degré Celsius, il faudrait que les émissions atteignent leur pic dès aujourd’hui ou au maximum d’ici 2025, puis qu’elles baissent de près de moitié d’ici 2030 (par rapport au niveau de 2019), pour atteindre la carboneutralité d’ici 2050.[2]
Limiter le réchauffement mondial à 1,5 degré Celsius ne sera plus possible sans une baisse immédiate et à large échelle des émissions de GES. Réduire rapidement les émissions limitera les futurs changements ainsi que les risques pour les écosystèmes et les sociétés humaines. Pour limiter le réchauffement climatique, il faudra des actions fortes, rapides et durables de réduction des émissions de CO2, de méthane et des autres gaz à effet de serre.
Dans ce contexte d’urgence climatique, les travailleurs et les travailleuses de la construction subissent les fluctuations des changements climatiques. Les canicules sont plus longues et plus nombreuses. Les grands froids sont plus mordants. Les travaux de la construction sont grandement influencés par le climat et la FTQ-Construction doit être prête pour répondre aux besoins de ses membres.
Cibles et plans
Pour être en mesure de répondre à ces objectifs globaux de réduction des émissions de GES, les différents paliers de gouvernement ont adopté des plans et des cibles de décarbonation dans les dernières années :
- CANADA : Plan de réduction des émissions pour 2030 : prochaines étapes du Canada pour un air pur et une économie forte[1]
- Réduction des émissions de GES de 40% à 45% d’ici 2030 (par rapport au niveau de 2005);
- Carboneutralité 2050.
- QUÉBEC : Plan pour une économie verte 2030[2]
- Réduction des émissions de GES de 37,5% d’ici 2030 (par rapport au niveau de 1990);
- Carboneutralité 2050.
- MONTRÉAL : Plan Climat Montréal[3]
- Réduction des émissions de GES de 55 % d’ici 2030 (par rapport au niveau de 1990);
- Carboneutralité 2050.
La mise en place des différents plans et des mesures proposées dans ces derniers devra être accélérée dans le contexte d’urgence climatique actuelle. La FTQ-Construction sait que les bâtiments auront une grande influence sur notre capacité d’atteindre ces cibles. Nous ne devons pas être complaisants, mais être ambitieux quant aux changements que notre industrie doit effectuer afin de réduire l’impact de notre industrie sur les changements climatiques.
Impacts sur le secteur de la construction
Selon de nombreux experts, la transition énergétique, la lutte aux changements climatiques et la création de politiques environnementales plus ambitieuses devraient avoir un impact positif sur l’emploi dans le domaine de la construction[1]. Comme partout dans le monde, le Québec et sa main-d’œuvre ne feront pas figure d’exceptions, et une variation positive pour le nombre d’emplois en construction devrait être observée à mesure que des moyens seront mis en place pour atteindre la carboneutralité[2]. Une des raisons expliquant cette variation vient de la capacité d’adaptation de l’industrie, de la multitude d’industries prenantes à ses activités en plus du peu de dépendance qu’a ce secteur envers les énergies fossiles[3].
Il est nécessaire de réaffirmer l’importance de la construction comme vecteur d’emploi puisqu’environ 275 000 Québécois occupent des emplois dans la construction ou ses industries connexes (quincaillerie, matériaux, construction, rénovation et entretien[4]).
Impacts de la transition sur la construction
D’abord, il faut comprendre l’impact des externalités de la lutte aux changements climatiques sur la construction et ses sous-secteurs. L’atteinte de la carboneutralité et d’un réchauffement climatique de 1.5 degré comparativement aux températures industrielles passe par les économies d’énergie et la consommation d’énergies alternatives. Dans le cas du Québec, qui consomme une énergie à 99% renouvelable à partir de l’hydroélectricité, cet enjeu ne devient que cyclique dépendamment des activités d’Hydro-Québec.
La réelle fluctuation sur l’emploi dans la construction et son influence sur la réduction du bilan carbone du Québec passe plutôt par le secteur du bâtiment. Encore une fois, la majorité des études sur le sujet portent sur l’Europe, en particulier le Royaume-Uni et l’Allemagne, mais les chiffres et retombées peuvent aussi être transposés à la situation du Québec. En Europe, 1.5 % de la population active occupe un emploi dans un domaine connexe à la construction alors qu’ici, il s’agit d’environ 1%[5]. Le Groupe de Travail sur la main-d’œuvre au Québec, la Commission parlementaire européenne sur le travail en plus de l’OCDE, arrivent tous à la conclusion que ce sera à partir d’incitatifs financiers offerts par le gouvernement pour la restructuration du réseau de bâtiments à travers les États que s’avèrera la meilleure opportunité de réduire les émissions de GES tout en contribuant à la création d’emplois[6].
Impacts des perturbations climatiques sur le secteur
Les travailleuses et les travailleurs de la construction ressentent déjà, à différents niveaux, les impacts des changements climatiques dans leur quotidien. D’abord, par la chaleur extrême. Déjà à partir de 2018, la FTQ-Construction présentait les risques de la chaleur extrême et des températures caniculaires à leurs membres et offrait des outils à ceux-ci pour s’acclimater[7]. L’acclimatation, bien que nécessaire, représente un enjeu de taille considérant qu’un réchauffement de 1.5 degré sur l’ère industrielle, soit le scénario idéal, risque tout de même de s’accompagner d’une augmentation prononcée du nombre de jours de canicule dans toutes les zones habitables de la terre au cours des prochaines années[8]. La chaleur extrême et le potentiel de voir plus de canicules auront des impacts directs sur la santé, en contribuant à l’apparition de maladies et de virus, mais auront aussi des impacts sur l’économie, puisqu’elle aura pour conséquence de rendre impraticables certains métiers d’œuvre au grand air, surtout en présence d’îlots de chaleur[9]. Les conditions dans les pays qui seront les plus touchés, dont les analyses laissent croire que le Canada fera partie, pourraient même mener à une augmentation du taux de mortalité dû à la chaleur de près de 1%[10].
Décarbonation sur l’ensemble du cycle de vie
Pour être en mesure d’intervenir efficacement sur les émissions de GES du secteur de la construction, il est essentiel de prendre en considération l’ensemble du cycle de vie des infrastructures et des bâtiments. En effet, au cours de sa durée de vie, l’empreinte carbone d’un bâtiment se compose du carbone intrinsèque, provenant de la fabrication et de la transformation des matériaux de construction et des processus de construction en soi, ainsi que du carbone opérationnel, provenant de leur consommation d’énergie. L’empreinte carbone totale d’un bâtiment équivaut donc à la somme du carbone opérationnel et du carbone intrinsèque, calculée sur l’ensemble du cycle de vie du bâtiment.
Pour le secteur des bâtiments, le carbone intrinsèque provient en majeure partie de l’extraction des matières premières et de la fabrication, du transport et de l’installation des matériaux. Ces émissions sont ainsi libérées dans l’atmosphère bien avant que le bâtiment ne soit opérationnel, ce qui renforce la nécessité d’agir rapidement en amont pour réduire le carbone intrinsèque.[11]
En effet, selon la Global Alliance for Buildings and Construction, le secteur des bâtiments et de la construction, en tant que source majeure d’émissions de gaz à effet de serre, doit être décarboné de toute urgence à travers une triple stratégie : réduire la demande d’énergie, décarboner l’approvisionnement en électricité et s’attaquer au carbone intrinsèque, si nous voulons avoir une chance d’atteindre l’objectif de l’Accord de Paris de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C.[12]
Pour arriver à mettre en œuvre ces trois stratégies et réduire l’empreinte carbone totale du secteur de la construction, il faudra miser sur l’activation et l’accélération de l’adoption de différents leviers complémentaires, tant sur le plan énergétique que sur le plan matériel. L’amélioration de l’efficacité énergétique ainsi que la transition vers des sources d’énergies renouvelables et à faibles émissions carbone auront un rôle crucial à jouer pour réduire l’empreinte opérationnelle, alors que l’utilisation de matériaux à faibles émissions de carbone, l’adoption de techniques de fabrication plus efficaces et la mise en place de stratégies d’économie circulaire, notamment l’optimisation de l’utilisation des matériaux, contribueront à réduire l’empreinte carbone intrinsèque.
Ces efforts de décarbonation peuvent se renforcer mutuellement, apporter de multiples avantages croisés, soutenir des transitions justes et contribuer à la santé et au bien-être des communautés.
4 | MATÉRIAUX & STRATÉGIES DE CIRCULARITÉ
Dans une perspective d’agir sur l’empreinte carbone de l’ensemble du cycle de vie des projets du secteur de la construction, il est essentiel de prendre en considération tant l’impact des matériaux que des processus utilisés à travers les différentes étapes de construction. L’empreinte carbone des matériaux, que ce soit à travers leur conception, leur fabrication, leur transformation, leur installation que leur fin de vie, représente une part importante de l’empreinte carbone du secteur et doit absolument être réduite pour permettre d’atteindre les cibles de décarbonation.
Économie circulaire
Parmi les leviers permettant la réduction de l’empreinte environnementale du secteur de la construction, l’économie circulaire s’avère aujourd’hui incontournable. Dans le contexte d’urgence climatique, il devient impératif de dépasser le système établi de production et de consommation linéaire, qui encourage la production accrue de déchets en aval ainsi que l’extraction et l’utilisation accrue de ressources en amont. L’idée derrière l’économie circulaire est de rejeter ce modèle d’économie linéaire prédominant et d’arriver à boucler un certain nombre de boucles à travers différentes stratégies de circularité.
Au Québec, il existe aujourd’hui une grande vélocité au niveau de la recherche et de la mise en application de l’économie circulaire. Mené par le Centre d’études et de recherches intersectorielles en économie circulaire (CERIEC), le Pôle québécois de concertation en économie circulaire regroupe de nombreuses parties prenantes de différents horizons; cette assise intersectorielle est en fait une spécificité très forte de l’économie circulaire au Québec, par rapport au reste du monde.
Le Pôle québécois de concertation sur l’économie circulaire définit l’économie circulaire comme « un système de production, d’échange et de consommation visant à optimiser l’utilisation des ressources à toutes les étapes du cycle de vie d’un bien ou d’un service, dans une logique circulaire, tout en réduisant l’empreinte environnementale et en contribuant au bien-être des individus et des collectivités»[1].
L’économie circulaire propose deux grands mécanismes de circularité : repenser pour réduire la consommation des ressources et préserver les écosystèmes, puis optimiser l’utilisation des ressources déjà en circulation. Ces deux ensembles de stratégies sont en fait guidés par la hiérarchie des déchets, privilégiant d’abord la prévention ainsi que la réutilisation.
Le premier mécanisme – Repenser – est basé sur trois stratégies (écoconception, consommation et approvisionnement responsable, optimisation des opérations), alors que le deuxième – Optimiser – propose neuf stratégies articulées autour de trois objectifs : utiliser les produits plus fréquemment (économie collaborative, location), prolonger la durée de vie des produits et composants (entretien et réparation, don et revente, reconditionnement, économie de fonctionnalité) et donner une nouvelle vie aux ressources (écologie industrielle, recyclage et compostage, valorisation).
Potentiel de circularité du secteur
Au Québec, le secteur de la construction s’avère prioritaire dans la transition vers l’économie circulaire, car il occupe non seulement une place importante dans l’économie québécoise, 18% du PIB, en incluant la gestion immobilière et les services de location[2], mais il est également l’un des plus grands consommateurs de ressources et générateurs de déchets.
Selon le Rapport sur l’indice de circularité de l’économie du Québec, l’habitation est la plus importante catégorie en matière d’utilisation de ressources au Québec. En effet, il est évalué que la construction et l’entretien des infrastructures et des maisons représentent 88 millions de tonnes (34%) de l’empreinte matérielle québécoise[3].
Par conséquent, le secteur génère également d’importants volumes de matières résiduelles (environ 27% des matières résiduelles de la province). En effet, au Québec, le secteur de la construction est responsable de 3M de tonnes de déchets annuellement. De cette quantité, il est estimé que 1,2M de tonnes sont jetées directement, tandis que 0,4M de tonne est éliminée au centre de tri. Le restant, soit 1,4M de tonne, est recyclée, récupérée à des fins de valorisation énergétique ou utilisée pour répondre au besoin de matériaux de construction et de recouvrement dans les sites d’enfouissement, ce qui représente 47% des matériaux de construction, rénovation et démolition (CRD)[4].
Si on évitait de produire autant de matières résiduelles ou si on arrivait à les réutiliser à travers des stratégies de circularité adaptées à la réalité sectorielle, cela représenterait un impact considérable sur l’empreinte carbone globale du secteur de la construction.
Économie circulaire en construction
L’objectif ultime d’accélérer l’adoption de stratégies d’économie circulaire dans le secteur de la construction est de limiter l’extraction de nouvelles ressources et l’enfouissement des déchets de construction, rénovation et démolition (CRD) grâce à des stratégies qui réduisent les flux et font circuler les matières.
Ainsi, à chacune des étapes de la chaîne de valeur d’un bâtiment, des stratégies de circularité qui permettent d’optimiser les ressources utilisées, de limiter l’extraction de ressources vierges et de limiter l’impact environnemental total du secteur peuvent être appliquées, comme le présente le schéma à la page suivante[5].
COMMANDE & CONCEPTION
Dans une perspective de repenser en amont, il est essentiel d’intégrer des considérations environnementales dès la commande du bâtiment. Dans la perspective d’utiliser moins de ressources, il est essentiel de sensibiliser les différentes parties prenantes aux bénéfices environnementaux de la rénovation et remettre en question la nécessité d’une nouvelle construction, lorsque possible.
De plus, il importe d’utiliser l’analyse de cycle de vie pour chaque nouveau projet afin de bien quantifier et d’ainsi, réduire l’empreinte carbone totale du bâtiment. En effet, l’écoconception appliquée en construction (sous différentes formes : écoconception des matériaux, conception en vue de la déconstruction des bâtiments, conception intégrée, certaines formes de préfabrication, etc.) est intéressante, car elle a ensuite un effet sur toutes les étapes de la vie du bâtiment et des matériaux. En utilisant une approche de “conception pour déconstruction”, il est aussi possible de prévoir la fin de vie du bâtiment et les stratégies qui seront privilégiées pour désassembler et récupérer les matériaux afin de leur donner une nouvelle vie, que ce soit par l’entremise du recyclage, du réemploi, de la réutilisation ou de la valorisation.
Il est aussi souhaitable de concevoir un nouveau projet en intégrant une stratégie de réduction à la source à travers toutes les étapes du cycle de vie d’un ouvrage bâti (conception, planification, distribution, construction, entretien), c’est-à-dire en visant la réduction de la quantité de matériaux neufs utilisés, mais aussi le gaspillage, la perte, la dégradation ou le rejet de matériaux. Une meilleure planification et gestion de chantier ainsi qu’une gestion rigoureuse des matières résiduelles permettront ainsi de réduire la consommation de ressources et d’améliorer la qualité des matières résiduelles.
CHOIX DES MATÉRIAUX
En amont du cycle de vie du bâtiment, le choix des matériaux s’avère crucial pour limiter l’empreinte du secteur de la construction. Il est possible de cibler de nouveaux matériaux, tant des matériaux innovants, biosourcés que des matériaux locaux et renouvelables, ou de miser sur la réutilisation de matériaux issus de la déconstruction.
Pour les nouveaux matériaux, il est préférable de favoriser les matériaux naturels et légers; lorsque possible, il faudrait remplacer l’acier, le ciment, la brique et le bois non certifiés qui sont tous les matériaux de construction qui causent d’importantes émissions de GES. Malheureusement, la demande pour ces matériaux ne cesse d’augmenter. Il nous faut trouver des solutions durables et efficaces ou améliorer le bilan de la fabrication de ces matériaux pour l’avenir.[1]
Afin de faciliter la comparaison entre les matériaux et permettre aux concepteurs et constructeurs de choisir adéquatement en fonction de leur projet, les fabricants de produits devraient fournir des déclarations environnementales de produits (DEP).
Au Québec, il existe de plus en plus d’initiatives favorisant la réutilisation des matériaux de construction. La Maçonnerie Gratton, avec sa machine BRIQUE-RECYC, permet de nettoyer la brique et de la réutiliser plus facilement. La récupération des briques permet d’éviter l’équivalent de six tonnes de CO2 pour un mur de 1000 pieds carrés.[2]
RÉNOVATION / ENTRETIEN
Afin de pouvoir préserver et prolonger la durée de vie des bâtiments et des infrastructures et ainsi réduire le nombre de ressources utilisées, il est aussi primordial d’accroître la rénovation et l’entretien des bâtiments existants. La rénovation est une composante clé de l’industrie de la construction au Québec; au cours des dernières décennies, on a dépensé davantage dans la rénovation que dans l’achat de nouveaux logements, et les innovations pour mettre en place des constructions moins exigeantes en matière de ressources se multiplient[3]. Il est essentiel de poursuivre dans cette avenue.
RECYCLAGE / RÉEMPLOI
Dans une perspective d’optimiser les ressources en circulation, la question de la mise en valeur des résidus de construction, rénovation et démolition (CRD) devient cruciale. On peut viser le réemploi et la réutilisation des matériaux, tout comme le recyclage et la valorisation. En recyclant davantage, les matières résiduelles deviennent des ressources; ce qui permet également d’enrayer l’extraction de matières premières. Toutes les matières tirées de la construction, de la rénovation et de la démolition pourraient être réutilisées dans de nouveaux projets et le nombre de nouveaux projets devrait diminuer grâce à la rénovation et l’entretien des constructions existantes. Selon le Rapport d’indice de circularité, il existe de nombreuses possibilités dans ce domaine : “Au Canada, 3,4 millions de tonnes de matériaux de construction sont envoyées à l’enfouissement chaque année, qui incorporent environ 1,8 million de teqCO2. Si le secteur de la construction privilégiait la déconstruction plutôt que la démolition – en réutilisant jusqu’à 85% des matériaux –, on pourrait réduire les émissions d’environ 1,3 million de teqCO2 par an et les volumes de matières résiduelles de 2,5 millions de tonnes.”[4]
En somme, dans toute réflexion de circularité, il est essentiel de prioriser les actions en amont de la chaîne, qui permettront de réduire l’utilisation de nouvelles ressources, et de miser sur des boucles courtes afin de rester le plus proche possible de l’usage initial du produit. Ces stratégies de circularité contribueront directement à la réduction des émissions de GES, mais peuvent aussi avoir des retombées au niveau de la résilience de la chaîne de valeur et la création d’emplois locaux, par exemple.
Ces réflexions doivent s’opérer tant dans le contexte de nouveaux bâtiments que dans la rénovation de bâtiments existants. Aujourd’hui, alors que le secteur de la construction au Québec a été ciblé comme ayant un fort potentiel de circularité[5], les initiatives se multiplient à l’échelle du territoire pour accroître et accélérer la mise en œuvre de stratégies de circularité dans le secteur.
On retrouve notamment parmi les acteurs le Laboratoire d’accélération en économie circulaire dans le secteur de la construction (Lab Accélération Construction), dont la mission est de démontrer, par des projets d’expérimentation innovants et co-créés avec les parties prenantes, comment intégrer puis généraliser des stratégies d’économie circulaire dans l’industrie de la construction au Québec[6].
À travers la démarche du laboratoire, de nombreux freins à l’économie circulaire ont été soulevés et priorisés par les acteurs impliqués, notamment en ce qui a trait à la réglementation, aux incitatifs financiers, aux techniques et outils ainsi qu’aux matériaux. De nombreux projets ont déjà été lancés à travers le laboratoire dans les derniers mois, permettant d’œuvrer directement sur ces différents freins. Parmi ceux-ci, on retrouve notamment un projet de réforme législative afin de doter le Québec d’un cadre réglementaire favorisant le réemploi et la valorisation des résidus de CRD, l’élaboration de principes de conception en vue de la déconstruction ainsi que la mise en place d’une plateforme de démantèlement des portes et fenêtres issue des étapes de déconstruction en vue de leur valorisation. De nombreux projets sont actuellement en développement au sein du Lab, par exemple la création d’outils pour les donneurs d’ouvrage en lien avec l’économie circulaire, alors que d’autres font l’objet d’appels à projets, comme l’étude d’impact de la construction modulaire et la rénovation circulaire de bâtiments.[7]
CONTRIBUTION À LA RECHERCHE EN ÉCONOMIE CIRCULAIRE
Ces projets multi-acteurs et interdisciplinaires permettront l’accélération de l’économie circulaire dans le secteur de la construction et contribueront à une meilleure compréhension des besoins et des enjeux du secteur ainsi qu’au développement et à la diffusion des bonnes pratiques de circularité. La FTQ-Construction reconnaît l’importance d’approfondir les connaissances pour appuyer la transition vers l’économie circulaire et souhaite contribuer concrètement à la recherche en économie circulaire en s’impliquant comme partie prenante du Laboratoire Accélération Construction.
COLLABORATION ACCRUE POUR L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE À L’ÉCHELLE TERRITORIALE
Dans les recommandations publiées par l’OCDE pour accroître la circularité à Montréal, on retrouve notamment la création de “réseaux, des groupes de discussion, des groupes de travail sectoriels impliquant les acteurs de terrain, en capitalisant sur les plateformes et réseaux existants (ex. : organiser une table ronde de travail entre les entrepreneurs dans le domaine de la construction et la Ville de Montréal)”.[8]
PLUS D’AMBITION AU NIVEAU DES POLITIQUES PUBLIQUES
Le Rapport sur l’indice de circularité mentionne que l’environnement politique du Québec est assez favorable aux mesures visant la réduction de l’utilisation de ressources dans le secteur : “son Plan d’action sur les changements climatiques illustre les efforts de la province pour rendre la construction écologique, la Mesure 19.4.3 sur la faible empreinte carbone des matériaux encourageant les projets à comparer l’incidence environnementale des bâtiments en bois et en béton, le recyclage des produits en bois, l’efficience énergétique et le choix des matériaux dans le secteur du bâtiment.”[9]
Cependant, il est possible d’en faire davantage pour accélérer la mise en place de davantage de stratégies de circularité, notamment au niveau de l’adaptation de la réglementation au niveau des différents paliers de gouvernement. Tous les paliers devraient donner l’exemple pour favoriser les réductions des émissions et stimuler l’innovation canadienne par leurs politiques d’approvisionnement.
Afin de favoriser l’innovation et l’adoption de pratiques circulaires comme l’écoconception et l’intégration de matériaux réutilisés, il serait essentiel d’adapter les politiques publiques au nouveau contexte d’économie circulaire, notamment par l’entremise de :
- Fin du règlement du plus bas soumissionnaire;
- Inclusion de critères d’économie circulaire dans les contrats publics;
- Inclusion d’exigences en matière de carbone intrinsèque dans toutes les politiques sur le carbone dans le secteur du bâtiment;
- Mesure fiscale sur la quantité de déchets produits durant le chantier de construction et envoyés au lieu d’enfouissement;
- Incitatifs financiers pour encourager l’utilisation de matériaux recyclés;
- Incitatifs financiers à la construction en bois massif et au béton sobre en carbone;
- L’assujettissement de la rénovation à la Loi R-20 pour assurer la compétence de la main-d’œuvre qui exécute les travaux.
MEILLEURE VALORISATION DES RÉSIDUS DE CRD
Afin d’être en mesure d’accroître la valorisation des résidus de CRD, il devient essentiel d’instaurer le principe de déconstruction au lieu de la démolition et de s’assurer que les travailleurs seront formés à cet effet. Ainsi, pour s’assurer de la qualité des matériaux, veiller à une certaine uniformité de la qualité des matières résiduelles et à la conformité de celles-ci aux exigences des recycleurs, il est primordial d’instaurer un tri à la source efficace et de s’assurer que les acteurs aient les formations et compétences nécessaires tant pour cette déconstruction que pour la gestion des matières résiduelles; aux différentes étapes du cycle de vie du bâtiment.
Tant pour les filières du réemploi, du recyclage que de la valorisation, il est essentiel que la relation entre l’offre et la demande de ces matériaux de seconde main soient facilitées afin d’accélérer leur adoption. Les débouchés existants doivent être exploités à tout leur potentiel et les projets de nouveaux débouchés doivent être encouragés pour favoriser la multiplication de stratégies de circularité.
Enfin, il est très important que ces matériaux ne soient plus considérés comme des matières résiduelles, mais qu’ils soient plutôt mis en valeur au même titre que de nouveaux matériaux aux yeux des concepteurs, mais aussi des consommateurs et des organismes publics.
IMPLICATION DES TRAVAILLEURS ET DES TRAVAILLEUSES
Il est essentiel de souligner que l’adoption de stratégies d’économie circulaire aura des répercussions sur le quotidien des travailleuses et des travailleurs de la construction, principalement en ce qui a trait au changement d’habitudes de travail et aux procédures propres à leur corps de métier. La mise en application d’une grande partie de ces stratégies de circularité en construction sera réalisée par des travailleurs et des travailleuses de la construction, il est donc impératif que ceux-ci soient représentés et inclus dans la recherche de solutions et la réflexion pour la mise en œuvre de ces différentes stratégies à l’échelle du Québec.
5 | TRANSITION ÉNERGÉTIQUE
Dans le secteur du bâtiment, la transition énergétique se vit à plusieurs niveaux. Il y a la conversion des bâtiments chauffés par des énergies non renouvelables, l’augmentation de la résilience et de l’efficacité énergétique des bâtiments et enfin, la préparation de la production d’énergie au cours des prochaines années pour répondre à la demande accrue en électricité. Si l’on considère l’ensemble du cycle de vie d’un bâtiment (de sa construction à son occupation), les bâtiments sont responsables de 38% des émissions de gaz à effet de serre au monde.[1] De plus, avec le réchauffement climatique, les besoins énergétiques pour la climatisation augmentent sans cesse.[2] Le défi au Québec sera de s’assurer de modèles de construction durable qui incluent une approche visant l’efficacité en temps chaud comme en temps froid. La demande énergétique est fortement dépendante de la température. Chaque degré de refroidissement l’hiver augmente de 400 MW la demande énergétique.[3] À l’inverse, la demande mondiale en énergie pour le refroidissement par temps chaud ne cesse d’augmenter et représente une augmentation de 5% de la demande énergétique mondiale en 2020. Dans les 20 dernières années, la demande énergétique pour la climatisation d’espaces habitables a plus que doublé. À moins de prise en charge et de changement de paradigme, la demande devrait encore doubler dans les 20 prochaines années.[4]
Hydro-Québec évalue ses surplus à près de 40 TWH par année en 2019[5]. La croissance de la demande d’électrification des transports et des besoins énergétiques du parc immobilier pourrait rapidement faire fondre ces surplus à moins que l’on optimise l’efficacité énergétique de ce que l’on a par la rénovation et de ce que l’on bâtira par de nouvelles normes.
Rénovation du parc immobilier québécois
Pour que l’industrie de la construction effectue le virage nécessaire pour atteindre les objectifs de réduction d’émissions de GES, le Québec et l’industrie doivent faire preuve de transparence et d’initiative. À l’aide de mesures telles que l’écofiscalité, la modernisation de la réglementation et des plans de décarbonation du parc immobilier, le gouvernement du Québec pourrait imposer une marche à suivre aux entreprises de construction qui mènera à des changements structurants et durables. Par la formation de la main-d’œuvre et des mesures incitatives, les travailleurs et les travailleuses intégreront ces nouvelles normes et pratiques dans leurs façons de faire. La formation de la main-d’œuvre facilitera l’harmonisation entre ce qui est nécessaire comme transformation et le savoir-faire de ceux qui devront le mettre en place.
Pour l’instant, les mesures mises en place par le gouvernement du Québec pour l’industrie de la construction sont insuffisantes. Dans le graphique du MELCC, on peut constater que les programmes Rénovert, Chauffez vert, Écoperformance bâtiment – Solaire, Construction en bois et la réforme des normes du bâtiment n’ont mené qu’à 0,3997 Mt éq. CO2 alors que le Québec cible 3,6 Mt[6] soit 20% sous le seuil de 1990. Le secteur du bâtiment doit être plus transparent et divulguer la performance énergétique des bâtiments et identifier des améliorations nécessaires. De plus, le gouvernement doit resserrer les normes du bâtiment et hausser les exigences d’écoefficacité énergétique et d’émission des bâtiments, tant pour les nouvelles constructions que du parc existant.[7]
Du point de vue canadien, le livre blanc du Conseil du bâtiment durable du Canada présente la norme du bâtiment à carbone Zéro comme un outil pour assurer le public et les promoteurs qu’une analyse exhaustive du cycle de vie du bâtiment a été faite. La norme guide les bâtisseurs dans toutes les étapes dans la conception et l’exploitation des bâtiments et elle est utilisée par certains gouvernements pour leurs appels d’offres. Toutefois, la prise en compte du carbone intrinsèque constitue un défi de taille et il reste encore beaucoup à accomplir en ce domaine.[8]
Impact sur l’emploi
Au Québec, ce serait près d’un million de bâtiments construits avant 1960 qui auraient besoin de travaux majeurs ou intermédiaires afin de répondre à de nouvelles exigences climatiques, de réduction de leur consommation d’énergie ou tout simplement pour la modernisation des systèmes d’alimentation et de chauffage[9]. Les expériences menées en Europe depuis la fin des années 1990, à l’image des programmes que nous connaissons au Québec soit Rénoclimat, Novoclimat ou autres, peuvent par contre démontrer quantitativement les impacts de la rénovation sur les emplois dans la construction.
D’abord, en Europe, ce type de programmes de rénovation aura permis, d’ici 2030, de réduire de 16 % les émissions de GES dont les bâtiments sont responsables[10]. De plus, à travers les 15 pays les plus anciens de l’Union européenne, la mise en place de ces programmes aura eu pour conséquence de créer 25 000 emplois additionnels dans le secteur de la construction annuellement entre 2004 et 2012, et ce, malgré la récession mondiale[11]. Ces nouveaux emplois, comptabilisés statistiquement comme permanents, sont souvent portés sur une durée d’environ 10 ans, soit le cycle normal de remplacement de bassin de main-d’œuvre et ainsi permettent une pérennité de la situation d’emploi dans le secteur en considérant la rotation de départ à la retraite et les compressions économiques[12]. De plus, dans la plupart des cas, les programmes gouvernementaux permettent la création d’emplois majoritairement à faible qualification sinon sans qualification particulière, ce qui permet un accès universel au secteur d’emploi. Toutefois, ces programmes à incitatifs financiers pour la rénovation se doivent d’être accompagnés d’une réforme des systèmes éducatifs vers une pédagogie environnementale dans les écoles de métiers et l’offre de formation en continu de qualité pour les travailleurs et les travailleuses ainsi que les entreprises qui devront se spécialiser en la matière[13].
Malgré les données encourageantes en provenance de l’Europe par rapport à la rénovation et la mise à jour du secteur du bâtiment, l’OCDE demeure pour sa part plus prudente. À partir des études économiques effectuées en partenariat avec le Bureau International du Travail en 2018, les conséquences statistiques sur l’emploi de la lutte aux changements climatiques se doivent d’être mieux comprises. En effet, à partir de projections économiques définies selon des indicateurs prévus pour l’économie mondiale vers une réduction des GES pour l’atteinte d’un réchauffement de 2 degrés comparativement à l’ère industrielle, les résultats sont plus conservateurs. Pour les pays en développement, le taux d’emploi risque de croître à grande vitesse, alors qu’en Occident, et particulièrement au Canada, la courbe de l’emploi, oui risque de croître, mais de près de 2.5% seulement[14]. À partir de ce modèle, il devient aussi possible de démontrer que moins le pays produira de GES, plus des emplois seront créés en construction[15]. Cependant, les chercheurs rappellent qu’il faut être prudent avec le nombre d’emplois concrets qui peuvent en ressortir et qu’il demeure toujours difficile de mettre le doigt sur un chiffre, surtout en considérant les externalités du secteur sur d’autres (foresterie, traitement, énergie, transport, etc.).
Préparation de la main-d’Œuvre
Les efforts nécessaires pour rendre plus efficace l’industrie de la construction et plus durables que les bâtiments du Québec sont considérables. Malgré toute la bonne volonté des décideurs, l’implantation de nouvelles méthodes ne peut se faire sans la collaboration des travailleurs et des travailleuses. Les plans gouvernementaux doivent inclure une valorisation de la formation de la main-d’œuvre pour une construction écoénergétique et durable.
Les travailleurs et les travailleuses doivent interpréter les plans, les projets. Ils et elles doivent savoir travailler avec les nouveaux matériaux, avec les nouvelles méthodes. Ce sont les travailleurs et les travailleuses qui mettent en place et donnent vie aux initiatives et projets structurants. Il y a de nombreux risques que de belles initiatives sur papier échouent à atteindre leur cible si ceux et celles qui doivent les mettre en place ne sont pas formés aux méthodes innovantes. La formation professionnelle est cruciale pour que les travailleurs et les travailleuses bâtissent les infrastructures du futur au niveau requis.[16]
Pour augmenter les connaissances générales de la main-d’œuvre et les encourager à intégrer les meilleures pratiques environnementales, la formation professionnelle doit inclure :
- Formation sur l’utilisation de nouveaux matériaux;
- Formation sur l’efficacité énergétique;
- Formation sur la conversion d’immeubles vers les énergies renouvelables;
- Formation sur le recyclage de matériaux, la déconstruction et la démolition efficace;
- Formation sur les nouvelles normes et les certifications environnementales.
De plus, les besoins de main-d’œuvre et de formation professionnelle pour avoir une main-d’œuvre qualifiée doivent être révisés afin d’inclure les changements climatiques dans l’évaluation des besoins à venir.
La formation doit aussi se faire auprès des entrepreneurs et donneurs d’ouvrage afin de les sensibiliser et s’assurer qu’au moment de planifier les travaux, ils choisissent des options écologiques. Le gouvernement et l’industrie doivent se coaliser afin de promouvoir l’élaboration d’un réseau d’acteurs clés qui développeront les compétences nécessaires pour mettre en place une économie circulaire et des programmes de formation professionnelle adaptés aux défis de la crise climatique.
6 | SOMMAIRE DES RECOMMANDATIONS
Faire pression sur les différents paliers de gouvernement pour exiger : |
– L’élaboration d’un scénario de décarbonation de l’industrie de la construction; – La fin du règlement du plus bas soumissionnaire afin de permettre des solutions mieux adaptées aux besoins de la transition énergétique; – La rénovation du parc immobilier pour l’adapter aux changements climatiques; – L’imposition des normes et quotas de recyclage dans le secteur de la construction; – L’inclusion de critères d’économie circulaire dans les contrats publics; – L’inclusion des exigences en matière de carbone intrinsèque dans toutes les politiques sur le carbone dans le secteur du bâtiment. – Des mesures fiscales sur la quantité de déchets produits durant le chantier de construction et envoyés au lieu d’enfouissement; – Des incitatifs financiers pour encourager l’utilisation de matériaux recyclés; – Des incitatifs financiers à la construction en bois massif et au béton sobre en carbone; – Des mesures fiscales pour encourager la rénovation de bâtiments énergivores; – L’inclusion dans le permis RBQ des formations sur les changements climatiques; – La révision du code du bâtiment pour inclure les meilleures pratiques en matière d’efficacité énergétique; – L’assujettissement de toute la rénovation. |
Collaborer avec le ministère de l’Environnement et les écoles de métier pour: |
– Pour augmenter les connaissances générales de la main-d’œuvre et les encourager à intégrer les meilleures pratiques environnementales; – Inclure dans la formation professionnelle un volet sur le recyclage de matériaux; – Valoriser la formation professionnelle et inclure dans le cursus des cours sur les meilleures pratiques environnementales. |
Participer aux travaux d’organisations de l’industrie |
– Collaborer avec les acteurs engagés sur le territoire, notamment à travers une implication dans la démarche en cours du “Lab Accélération Construction” du CERIEC; – S’impliquer dans les discussions avec les différents paliers de gouvernement; – Joindre la Global Alliance for buildings and construction; – Collaborer avec les autres syndicats pour une transition juste. |
7 | CONCLUSION
Le secteur de la construction, des bâtiments comme des infrastructures, a un rôle majeur à jouer dans la décarbonation de l’économie mondiale, grâce à des améliorations de l’efficacité énergétique pour réduire la demande d’énergie, en réduisant l’utilisation de matériaux et en réduisant le carbone intrinsèque, et en soutenant l’adoption d’énergies renouvelables et à faibles émissions de carbone.
La lutte aux changements climatiques fait partie de l’action syndicale. Ce sont les travailleurs et les travailleuses qui subissent les canicules sur les chantiers et font des coups de chaleur. Ce sont les travailleurs et les travailleuses qui devront vivre avec les catastrophes naturelles et la transformation de leur milieu de vie. À travers le monde, les organisations syndicales s’organisent et se coalisent pour exiger une action des gouvernements pour prévenir et agir avant qu’il ne soit trop tard. En santé et sécurité, on comprend très bien le principe de prévention d’élimination du danger à la source. Pour les changements climatiques, nous devons approcher cette lutte de la même manière. Si nous attendons qu’il y ait plus d’accidents et plus de morts ou que les changements nécessaires soient drastiques, il sera trop tard. C’est notre devoir de conscientiser les gouvernements et mobiliser nos membres afin d’être proactifs et réduire le plus possible l’impact négatif des changements climatiques sur nos vies.
Ce que la FTQ-Construction propose dans ce plan n’est pas révolutionnaire, c’est simplement de s’ouvrir les yeux et voir comment l’on peut bâtir de façon intelligente et durable. Nous savons que nous œuvrons sous la pression du profit et du plus petit soumissionnaire. C’est pourquoi il faut une intervention étatique et une pression populaire pour s’assurer que toute construction qui s’effectue au Québec intègre des normes et des pratiques qui réduisent l’impact des GES.
8 | RÉFÉRENCES
Bureau international du travail, Principes directeurs d’une transition juste vers des sociétés et des économies durables pour tous, lien : https://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/—ed_emp/—emp_ent/documents/publication/wcms_432864.pdf
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Dupréssoir, Sophie et al, Changement climatique et emploi : Impact sur l’emploi du changement climatique et des mesures de réduction de CO2 dans l’Union européenne à 25 ans de l’horizon 2030
Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, La transition juste au Québec- Guide argumentaire, 2019
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Whitmore, J., Pineau, P.-O., Harvey, J., 2022. Bilan du Plan d’action 2013-2020 sur les changements climatiques et perspectives sur le Plan pour une économie verte 2030, Chaire de gestion du secteur de l’énergie, HEC Montréal.
[1] Gouvernement du Canada (2022). Récupéré de https://www.canada.ca/fr/services/environnement/meteo/changementsclimatiques/plan-climatique/survol-plan-climatique/reduction-emissions-2030.html
[2] Gouvernement du Québec (2022). Récupéré de https://www.quebec.ca/gouvernement/politiques-orientations/plan-economie-verte/a-propos
[3] Ville de Montréal (2020). Plan Climat 2020-2030. Récupéré de https://portail-m4s.s3.montreal.ca/pdf/Plan_climat%2020-16-16-VF4_VDM.pdf
[1] GABC, 2020 Global Status report for buildings and construction, UN Environment program, 2020.
[2] GABC, 2020 Global Status report for buildings and construction, UN Environment program, 2020.
[1] Dupréssoir, Sophie et al, Changement climatique et emploi : Impact sur l’emploi du changement climatique et des mesures de réduction de CO2 dans l’Union Européenne à 25 ans de l’horizon 2030, p.44
[2] GTMOQ, La transition énergétique et la main-d’oeuvre québécoise : Promouvoir des transformations durables sur le plan écologique et social dans les secteurs du transport, du bâtiment et de l’énergie, 2018, p.9
[3] Mertins-Kirkwood, Hadrian, Making decarbonization work for workers; policies for a just transition to a zero-carbon economy in Canada, p.14
[4] GTMOQ, La transition énergétique et la main-d’oeuvre québécoise : Promouvoir des transformations durables sur le plan écologique et social dans les secteurs du transport, du bâtiment et de l’énergie, 2018, p.43
[5]Statistique Canada, Recensement de la population du Canada, 2016, Consulté en ligne le 5 juillet 2021, Url : https://www12.statcan.gc.ca/census-recensement/2016/dp-pd/prof/
[6] Bureau International du Travail, L’action pour le climat, une action contre l’emploi?, p.583, url https://onlinelibrary-wiley-com.ezproxy.usherbrooke.ca/doi/pdfdirect/10.1111/ilrf.12100
[7] Un coup de chaleur, ça frappe fort, https://ftqconstruction.org/sante-securite/un-coup-de-chaleur-ca-frappe-fort/
[8] GIEC, Rapport spécial sur le climat et les impacts des changements climatiques, 2019, p.9 url : https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/sites/2/2019/09/IPCC-Special-Report-1.5-SPM_fr.pdf
[9] GIEC, Rapport spécial sur le climat et les impacts des changements climatiques, 2019, p.11
url : https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/sites/2/2019/09/IPCC-Special-Report-1.5-SPM_fr.pdf
[10] GIEC, Rapport spécial sur le climat et les impacts des changements climatiques, 2019, p.13
url : https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/sites/2/2019/09/IPCC-Special-Report-1.5-SPM_fr.pdf
[11] Conseil du bâtiment durable du Canada (2021). Le carbone intrinsèque: un bilan pour les bâtiments au Canada. https://www.cagbc.org/wp-content/uploads/2022/03/2022_FR_cagbc_white-paper_embodied-carbon_v2-2.pdf
[12] Global Alliance for Buildings and Construction (2021). Global Status Report 2021. Récupéré de https://globalabc.org/resources/publications/2021-global-status-report-buildings-and-construction
[1] GABC, The 10 key Measures, UN Environment program.
[2] https://www.maconneriegratton.com/briques-pierres-recycles
[3] Circle Economy et RECYC-QUÉBEC (2021). Rapport sur l’indice de circularité de l’économie du Québec 2021. Récupéré de https://www.recyc-quebec.gouv.qc.ca/sites/default/files/documents/rapport-indice-circularite-fr.pdf
[4] Circle Economy et RECYC-QUÉBEC (2021). Rapport sur l’indice de circularité de l’économie du Québec 2021. Récupéré de https://www.recyc-quebec.gouv.qc.ca/sites/default/files/documents/rapport-indice-circularite-fr.pdf
[5] CPEQ, CPQ, et EEQ. (2018). L’économie circulaire au Québec: opportunités et impacts économiques. Repéré à https://www.cpq.qc.ca/wp-content/uploads/2018/03/economie-circulaire-au-quebec.pdf
[6] https://www.etsmtl.ca/getmedia/71905db9-f7a1-414e-b1f6-7274e2e51365/APR_LabCo_Avril_2022_guide_v3
[7] Lab Accélération Construction https://miro.com/app/board/o9J_lTyxiCU=/?invite_link_id=897069187463
[8] Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) (2022). Vers une stratégie d’économie circulaire à Montréal : comment accélérer la transition. Récupéré de https://www.oecd.org/cfe/cities/Montreal_economie_circulaire.pdf
[9] Circle Economy et RECYC-QUÉBEC (2021). Rapport sur l’indice de circularité de l’économie du Québec 2021. Récupéré de https://www.recyc-quebec.gouv.qc.ca/sites/default/files/documents/rapport-indice-circularite-fr.pdf
[1] RECYC-QUÉBEC (2019). L’économie circulaire, une priorité. Récupéré de https://www.recyc-quebec.gouv.qc.ca/entreprises-organismes/mieux-gerer/economie-circulaire
[2] Circle Economy et RECYC-QUÉBEC (2021). Rapport sur l’indice de circularité de l’économie du Québec 2021. Récupéré de https://www.recyc-quebec.gouv.qc.ca/sites/default/files/documents/rapport-indice-circularite-fr.pdf
[3] Circle Economy et RECYC-QUÉBEC (2021). Rapport sur l’indice de circularité de l’économie du Québec 2021. Récupéré de https://www.recyc-quebec.gouv.qc.ca/sites/default/files/documents/rapport-indice-circularite-fr.pdf
[4] RECYC-QUÉBEC (2020). Les résidus de construction, de rénovation et de démolition (CRD). Récupéré de https://www.recyc-quebec.gouv.qc.ca/sites/default/files/documents/bilan-gmr-2018-section-crd.pdf
[5] Adaptation du schéma proposé par le Lab Accélération Construction. Récupéré de https://miro.com/app/board/o9J_lTyxiCU=/?invite_link_id=897069187463.
[3] État de l’énergie au Québec 2022, https://energie.hec.ca/eeq
[4] GABC, 2020 Global Status report for buildings and construction, UN Environment program, 2020.
[5] État de l’énergie au Québec 2022, https://energie.hec.ca/eeq
[6] Pour l’ensemble des industries.
[7] Whitmore, J., Pineau, P.-O., Harvey, J., 2022. Bilan du Plan d’action 2013-2020 sur les changements climatiques et perspectives sur le Plan pour une économie verte 2030, Chaire de gestion du secteur de l’énergie, HEC Montréal.
[8] Conseil du bâtiment durable du Canada (2021). Le carbone intrinsèque: un bilan pour les bâtiments au Canada. https://www.cagbc.org/wp-content/uploads/2022/03/2022_FR_cagbc_white-paper_embodied-carbon_v2-2.pdf
[9] GTMOQ, La transition énergétique et la main-d’oeuvre québécoise : Promouvoir des transformations durables sur le plan écologique et social dans les secteurs du transport, du bâtiment et de l’énergie, 2018, p.44
[10] Dupréssoir, Sophie et al, Changement climatique et emploi : Impact sur l’emploi du changement climatique et des mesures de réduction de CO2 dans l’Union Européenne à 25 ans de l’horizon 2030, p.154
[11] Dupréssoir, Sophie et al, Changement climatique et emploi : Impact sur l’emploi du changement climatique et des mesures de réduction de CO2 dans l’Union Européenne à 25 ans de l’horizon 2030, p.160
[12] Dupréssoir, Sophie et al, Changement climatique et emploi : Impact sur l’emploi du changement climatique et des mesures de réduction de CO2 dans l’Union Européenne à 25 ans de l’horizon 2030, p.161
[13] GTMOQ, La transition énergétique et la main-d’oeuvre québécoise : Promouvoir des transformations durables sur le plan écologique et social dans les secteurs du transport, du bâtiment et de l’énergie, 2018, p.46
[14] Bureau International du Travail, L’action pour le climat, une action contre l’emploi?, p.589, url https://onlinelibrary-wiley-com.ezproxy.usherbrooke.ca/doi/pdfdirect/10.1111/ilrf.12100
[15] Bureau International du Travail, L’action pour le climat, une action contre l’emploi?, p.589, url https://onlinelibrary-wiley-com.ezproxy.usherbrooke.ca/doi/pdfdirect/10.1111/ilrf.12100
[16] GABC, 2020, Global Roadmap for Buildings and Construction 2020-2060 – Towards Zero-emission, efficient, and resilient buildings and construction sector. UN Environment Program.
[1] IPCC (2022). Climate Change 2022: Mitigation of Climate Change. https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg3/
[2] IPCC (2022). Climate Change 2022: Mitigation of Climate Change. https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg3/
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