Qualité des travaux de construction, formation professionnelle et santé et sécurité: les organismes gouvernementaux ne font pas leur job

Montréal, le 16 septembre 2021. – Quand on regarde en détail le portrait de l’industrie de la construction, on constate rapidement un important recul en matière de qualité des travaux, de formation professionnelle et de rétention de la main-d’œuvre. Depuis, quelques années, la FTQ-Construction dénonce partout la diminution de la compétence dans la construction et ses impacts. Cette semaine, des reportages ont dénoncé le manque de rigueur de la Régie du bâtiment du Québec (RBQ). Cependant, la réalité ne s’arrête pas à la RBQ, il y a aussi un relâchement de la Commission de la construction du Québec (CCQ) en matière de formation professionnelle et de développement des compétences en chantier. Malgré toutes ces dénonciations, que font ces organismes publics?

Deux rapports de la VGQ sur la compétence dans la construction

En 2018, la Vérificatrice générale du Québec (VGQ) constatait que la CCQ n’avait pas les outils et ne faisait pas les vérifications nécessaires afin d’assurer la compétence des travailleurs et des travailleuses de la construction. Depuis ce rapport, aucun changement véritable de ce côté. Encore pire, au lieu de favoriser les diplômés, la CCQ facilite l’entrée de nouveaux travailleurs sans aucune formation préalable. Ces travailleurs abandonnent davantage (40%) que chez les diplômés (24%) après 5 ans sur les chantiers.

Dans la même veine, la VGQ constate dans une étude des pratiques de la RBQ (juin 2021) que les entrepreneurs non plus ne sont pas soumis à des évaluations rigoureuses. La RBQ ne détient pas les outils et ne fait pas les démarches afin de s’assurer que les détenteurs de licence de la RBQ sont compétents et savent ce qu’ils font.

La FTQ-Construction est extrêmement choquée de ces constats. « Ce que la VGQ dit dans ses rapports c’est que les deux organismes qui ont pour mission de superviser la construction ne s’attardent pas adéquatement à la compétence. C’est un laissez-faire qui est inacceptable. Pour que les constructions du Québec soient sécuritaires, de qualité et durables, on doit compter sur une main-d’œuvre qualifiée, formée et valorisée. L’industrie de la construction est perdante à tous les niveaux. Le gouvernement doit s’investir davantage dans la formation professionnelle des métiers de la construction s’il veut réaliser tous les projets de construction annoncés dans la relance économique. Nous avons soumis plusieurs solutions que nous considérons réalisables à court terme et qui serviraient l’intérêt de toute l’industrie. Nous souhaitons ardemment être écoutés. Nous croyons fortement que la formation professionnelle dans la construction doit faire l’objet d’une attention particulière par les organismes et les ministères concernés. » déclare Éric Boisjoly, directeur général de la FTQ-Construction.

Diminution des inscriptions aux DEP : on envoie un mauvais message

Afin d’obtenir des cartes de compétence dans la construction, on peut soit passer par les diplômes d’études professionnelles (DEP) ou par les ouvertures pour cause de pénurie (par bassin) avec une obligation de seulement 30 heures de formation. La FTQ-Construction constate une baisse de 30% d’entrées par les programmes d’études menant aux métiers de la construction (DEP) au profit des ouvertures par bassin. Alors que 62% des entrées dans l’industrie avaient auparavant un diplôme, elles ne sont plus que 32% en 2020. De plus, la FTQ-Construction remarque une autre tendance plus récente qui s’installe dans plusieurs régions : nombreux sont ceux qui abandonnent leurs études ou attendent patiemment l’ouverture des bassins en se faisant promettre un emploi plutôt que de suivre une formation professionnelle. « Plusieurs se demandent à quoi bon aller à l’école s’ils peuvent faire sans. L’information circule allègrement et il y a un impact direct sur les inscriptions aux DEP de notre industrie. À moyen terme, on va se retrouver avec très peu de travailleurs avec des connaissances théoriques de leur propre métier.» s’inquiète Éric Boisjoly.

La CCQ, qui doit veiller à la compétence dans l’industrie, doit absolument avoir un regard sur l’impact des ouvertures de bassins et s’assurer que ces personnes puissent être formées.

Des impacts négatifs sur la qualité des travaux et la santé et sécurité

La diminution du nombre de travailleurs détenant un diplôme a un impact direct sur la qualité des travaux. Depuis 2016, 60% des travailleurs qui entrent dans l’industrie de la construction ne détiennent aucune formation préalable. Les constatations de la VGQ ainsi que l’utilisation du mécanisme d’ouverture de bassins font en sorte d’annuler les avancés des années précédentes sur la progression de la proportion de nouveaux apprentis ayant un diplôme. La FTQ-Construction souhaite que le gouvernement, le MTESS et le MÉES soutiennent les besoins de nouveaux diplômés afin d’assurer une relève plus compétente et plus stable pour les années à venir. Des efforts doivent être faits pour former davantage de main-d’œuvre dans les CFP (centres de formation professionnelle).

La diminution de la compétence sur les chantiers influence la santé et sécurité. De nombreux accidents impliquent des travailleurs peu ou non formés. La construction est l’industrie la plus mortelle au Québec, il est donc inconcevable de ne pas privilégier l’accès aux travailleurs qui détiennent les compétences requises, ce qui peut sauver des vies. Dernièrement, un apprenti menuisier, âgé d’une quarantaine d’années, qui est entré par bassin sans formation est décédé après avoir été happé par une grue sur un chantier à Brossard.  Nous attendons les résultats d’enquête de la CNESST et du coroner.  C’est pourquoi nos représentants demandent constamment à la CNESST d’être extrêmement vigilante et moins tolérante.