Le mercredi 27 février 2008 – Voilà, c’est fait! Le gouvernement conservateur vient de présenter son budget et encore une fois il consacre le détournement des avoirs de la caisse d’assurance-emploi à d’autres fins que celles pour laquelle elle doit servir. Sous le titre de «Améliorer la gestion et la gouvernance de l’assurance-emploi», le ministre des Finances présente cette bonne nouvelle qui aura pour conséquence directe de limiter toute bonification à notre régime d’assurance-emploi.

Rétrospective de la Loi sur l’assurance-emploi

Il faut d’abord se souvenir que la Loi sur l’assurance-chômage, tel était son nom à l’époque, avait été amendée dans les années 1990 de manière à réduire le taux de prestations hebdomadaires et la durée de la période prestation. On abolissait le mécanisme de revalorisation des prestations, mécanisme introduit antérieurement afin d’éviter les gestes de «partisannerie» à même la condition des chômeurs. Le taux de prestations va ainsi stagner pendant plus 15 ans et les gouvernements, libéraux et conservateurs, se serviront de la caisse à d’autres fins.

On se souviendra aussi que le prétexte ayant mené à ces amendements résidait dans le caractère avantageux des prestations, encourageant ainsi nombre de bénéficiaires à demeurer sans emploi, mais dans les faits, la réalité était toute autre. Nous étions en crise et l’activité de l’industrie de la construction avait chuté de 50%, entraînant une perte d’environ 45 000 emplois. Comme quoi la «paresse» semble être une fixation chez les conservateurs ou les anciens conservateurs, tout aussi «lucides» qu’ils soient.

Sous le couvert de ce discours d’excuses, on visait tout simplement à niveler notre régime vers le bas. Niveler en raison de quoi? On devine facilement que sous cette «généreuse politique sociale» se cache le prétexte visant une réduction des pressions économiques, toujours la même plate excuse, entre des régimes semblables que possèdent nos voisins du sud au moment où des accords commerciaux bilatéraux et trilatéraux entraient en jeu.

Les travailleurs et les travailleuses de la construction condamnés

Depuis, rien n’a changé. Pour l’industrie de la construction, ce débat demeure d’une importance capitale. Malgré l’aveuglement volontaire des divers gouvernements qui se sont succédés à Ottawa et malgré nos appels répétés, ils sont demeurés sourds à nos justes doléances. Comment ne peuvent-ils comprendre des faits qui parlent d’eux-mêmes?

Le cas est pourtant simple. Un chantier de construction dure en moyenne 2 mois et demi. À chaque fin de chantier, le travailleur doit partir en quête d’un nouvel emploi. Le lien entre l’employeur et le travailleur est d’une durée limitée. De plus, le régime entretient des bassins de main-d’œuvre disponible (donc un chômage synthétique, des chômeurs obligés, des sans emplois non volontaires) afin qu’il y ait toujours des travailleurs prêts à répondre à la demande lorsqu’elle se présente. Malgré ce constat, on condamne des travailleurs à bénéficier de prestations réduites afin de répondre à un caprice.

D’autres administrations, toutes aussi irresponsables, se permettent, pour faire plaisir à on ne sait qui, de prétendre que l’industrie doit intégrer 11 000 nouveaux salariés annuellement durant 5 ans. Plutôt que de rationaliser l’industrie, on crée volontairement des chômeurs. Bah! Au prix où ils coûtent, qui s’en soucie? Bravo! Et l’on prend la peine de titrer «Améliorer l’administration et la gouvernance».

Nouvelle arnaque conservatrice

Alors que ce même gouvernement parle d’une possible récession, que l’industrie du bois est en crise frappant les régions de plein fouet, qu’en raison d’une politique pétrolière désastreuse le dollar canadien atteint des sommets et met en péril l’ensemble du secteur manufacturier et industriel, ce bon gouvernement imprégné d’un souci de saine «administration et de gouvernance» (et riche de près de 60 milliards de cotisations déjà payées) ne daigne même pas bonifier le régime d’assurance-emploi.

Pis encore, il ne le rend même pas au seuil de ce qu’il était il y a 15 ans en revalorisant le taux de prestation à ce qu’il devrait être, n’eût été de ses douteuses interventions. À ce stade-ci, créer une caisse distincte sans modifier le régime de prestation n’a aucun sens en soi. Car dans les faits, pourquoi demander une caisse distincte, sinon pour permettre aux mauvais politiciens, ceux qui parlent aujourd’hui de gouvernance et d’administration, de faire fi de leurs obligations, sinon juridique du moins légitimes, d’agir comme tout bon fiduciaire.

Un gouvernement méprisant

La FTQ-Construction ne croit pas que la politique d’assurance-emploi de ce gouvernement en soit une d’amélioration de l’administration et de gouvernance. Il s’agit encore une fois d’un acte méprisant à l’endroit de ceux qui quotidiennement construisent ce pays, sur les chantiers, dans les usines, dans les bureaux ou dans tout autre lieu de travail.

Nous ne savons, en matière d’emploi, ce que demain nous réserve. Qu’on se souvienne des drames survenus lors de récessions antérieures; celles des années 1980 et 1990 demeurent de saisissants exemples de ce qui nous guette si nous ne sommes ni prudents, ni visionnaires. Nombreux sont ceux qui, à cette époque, se croyaient en sécurité. Ils ont vite déchanté au moment où ils ont dû faire appel à ce régime, alors que de toute leur vie, ils n’avaient connu ni chômage, ni misère.

La différence cette fois, c’est que nous avons les moyens de faire face à cette menace. La caisse d’assurance-emploi regorge de cet argent que nous avons versé. Elle nous appartient et nous l’avons versé à cette fin, conformément à la Loi. Le gouvernement persiste et signe: le monde ordinaire ne fait pas partie de son agenda politique. Pas de souci. Tant qu’aux libéraux, ils feront peu de cas de cette question. Pour eux, les élections sont la seule préoccupation qui demeure. Monsieur Dion, le chef de l’opposition, plus préoccupé par son image, que par le sort réservé aux chômeurs, appuiera un budget conservateur.

De toute manière, les travailleurs de la construction se souviennent qu’un autre libéral, Denis Coderre, s’était engagé auprès de la FTQ-Construction à faire modifier la Loi dans le sens de nos revendications. Sommes-nous étonnés d’apprendre qu’il n’a jamais tenu parole? Il n’y a rien à attendre de l’opportunisme.

Alors, de toutes ces questions, qui s’en soucie? La FTQ-Construction.

Le directeur général adjoint
Richard Goyette