Le jeudi 13 décembre 2007 – Le 27 novembre dernier, l’émission La Facture (Radio-Canada) diffusait une capsule qui, à la lumière des données fournies par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST), concluait à une baisse des lésions professionnelles à survenir au Québec. Or, pour la FTQ-Construction, il est clair que cette conclusion est erronée!

Des statistiques trompeuses
À plusieurs reprises, la FTQ-Construction a dénoncé le fait que la CSST émette des données biaisées ne reflétant absolument pas la réalité des accidentés du travail.

Ce sont pourtant ces chiffres qui ont été repris par La Facture. À cet effet, Richard Goyette, directeur général adjoint de la FTQ-Construction, s’est maintes fois exprimé sur le sujet: «Nous considérons anormal que la Commission diffuse ces données qui laisse croire à une diminution des accidents de travail alors qu’en réalité, c’est totalement l’inverse qui se produit dans nos milieux de travail.» «C’est d’autant plus vrai que cette situation touche directement l’industrie de la construction: près de 20% des accidents de travail relève de notre secteur alors que nous ne représentons que 4% de la main-d’œuvre québécoise», poursuit-il.

Les conditions de sécurité et de salubrité dans lesquelles les travailleuses et les travailleurs oeuvrent au quotidien, trente ans après l’adoption de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (L.R.Q., c. s-2.1) demeurant pourtant souvent difficiles, voir même parfois sordides, peut-on raisonnablement croire que le nombre de lésions attribuables à ces conditions s’améliore? La FTQ-Construction remet en question les chiffres que utilisés dans le cadre de l’émission La Facture.

D’où vient l’erreur?
Pour répondre à cette question, il faut savoir que la CSST possède le monopole exclusif du processus orchestrant la déclaration d’une lésion professionnelle. Pour remettre en question les chiffres «officiels» de la Commission, il faut donc procéder à une analyse des faits survenus ces dernières années entourant l’obligation de déclarer les accidents. Pour ces aspects, seul une rencontre sur le «terrain» nous permet d’en saisir toute la portée. Bien que purement empirique, cette procédure nous permet d’accéder à une autre réalité que celle d’un tableau statistique fourni par la Commission et commenté avec un évident souci de faire bonne figure.

La source du mal
La principale cause ayant entraîné une sous déclaration d’événements est sans aucun doute la décision CSST c. Produit forestier CP Ltée, rendue par le Tribunal du travail le 1er février 1993. Cette décision prévoit qu’un employeur n’est pas tenu de déclarer une lésion professionnelle s’il ne verse pas d’indemnité pour les 14 premiers jours suivant l’événement. On comprend que l’employeur tente alors d’affecter la personne ayant subit la lésion à un travail «convenant» à son état physique (assignation temporaire).

La deuxième cause, tient en une modification apportée en 1996 à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., c. A-3.001), permettant aux employeurs de se regrouper afin d’obtenir un meilleur taux de cotisation. Cela a mené à la création des «mutuelles de prévention», qui n’ont d’ailleurs que le nom en matière de prévention. Ces mutuelles ont largement répandu l’«assignation temporaire». Situation généralisée dans les milieux de travail, il s’agit trop souvent de postes mésadaptés qui servent à camoufler les accidents.

Sachant que l’immense majorité des lésions professionnelles à survenir entraîne un arrêt de travail de moins de 15 jours, nous retrouvons facilement la cause de cette diminution drastique du nombre de lésions déclarées, mais non de lésions survenues. Ce qui explique d’ailleurs que, malgré une apparente diminution des lésions, le bilan relatif aux décès à survenir n’est pas reluisant. La CSST a aussi de bonnes explications sur le sujet, mais elles sont tout aussi erronées.

Le Québec n’a pas de quoi être fier
Le 28 avril 2007, dans le cadre de la Journée internationale de commémoration des personnes tuées ou blessées au travail, la FTQ livrait des données chiffrées provenant de l’ACNOR (Association canadienne de normalisation). Selon cette dernière, le Canada se classe au 5e rang des taux les plus élevés de tous les pays de l’OCDE en ce qui a trait au décès à survenir en raison du travail. Seuls la Corée, le Mexique, le Portugal et la Turquie possède un pire score que nous. Est-il nécessaire d’ajouter que les performances du Québec, en ce domaine, ne lui permettent pas de pavoiser en regard des autres provinces du pays?
Ce bref résumé permet de tirer les conclusions qui s’imposent. Au nom de tous ceux qui sont morts ou blessés au travail, il importe de rétablir les faits. La volontaire politique de l’autruche qu’entretient abondamment et avec complaisance la Commission de la santé et de la sécurité du travail doit être mise en évidence et dénoncée: il en va de la santé et de la sécurité des personnes dont elle a pourtant le mandat de protéger.

Le directeur général adjoint
Richard Goyette